Vous cherchez Roof?

Roof? Ouais, c'est le type dans le fond du bar, là-bas. Ouais. Il vient rarement ici; il ne cache à personne qu'il fréquente plus souvent le Randall's, à Redmond.
Un type étrange, je vous dis. Pas vraiment dangereux si on l'aborde avec respect, et définitivement moins "bestial" qu'il en a l'air, avec sa queue, ses serres et ses crocs cybernétiques. Il est même plus brillant qu'on peut penser, plusieurs vont l'aborder seulement pour le voir se fâcher, et plusieurs reviennent bredouille... Attention, j'ai pas dit qu'il ne se battait jamais. Même ici, à Penumbra, il en a fait regretter à certains irrespecteux, et par la même occasion aux bouncers qui essayaient de l'en empêcher.
Au combat, c'est un monstre, mais il ne recule jamais non plus dans la discussion. Vantard, on se demande souvent si il "embellit" ses histoires. Il ira jusqu'au bout pour défendre ce qu'il dit, et est très vindicatif sous l'insulte, mais il reste étrangement calme, ne se sentant effectivement insulté que lorsque son interlocuteur est allé trop loin... chose dont il se rend compte peu après.

Allez le voir, je vous dis. Il a une conversation agréable la plupart du temps. Pas si mal pour un tordu qui rêvait de se faire cybermancier...

Né dans une famille de classe moyenne dans le district de Tacoma, à Seattle, Russel Huxley a reçu une bonne éducation dès son enfance, gracieuseté de Yamatetsu America, Inc. Bien sûr, après avoir terminé son secondaire dans leurs écoles privées, Russel fut attiré vers une carrière en cybernétique, plus particulièrement en recherche sur la perte d’essence. Bien qu’il ne fût pas magicien, il comprenait assez bien la relation complexe entre la chair et l’acier pour en minimiser les effets négatifs et pousser la théorie à l’extrême.

Pendant le collège, toutefois, Russel commença à sentir que tout autour de lui le restreignait plutôt que de le faire avancer. Les restrictions de la « vie sécuritaire » proposée par Yamatetsu lui paraissaient étouffantes. Bien qu’il fût un étudiant modèle pendant sa jeunesse, à 18 ans, en 2050, il se dissocia soudainement de cette vie qui l’avait sournoisement lassé. Il laissa tomber l’école et, voulant couper tout contact avec ses parents, amis ou connaissances, il alla s’installer hors du confort des banlieues de Tacoma, c’est-à-dire dans les barrens à puyallup.

Russel ne voulait vraiment plus entendre parler de son ancienne vie; il aurait pu se trouver un « emploi » en étant Street Doc spécialisé en cybernétique, mais n’en fit rien. S’il voulait recommencer, se disait-il, il allait réellement falloir repartir à zéro. Les rues de Puyallup allaient s’avérer l’école parfaite pour sa nouvelle vie. Bien que les premières années furent difficiles, il fût attiré vers un groupe de techno-amateurs, jeune à l’époque, appelé les « Reality Hackers », aujourd’hui encore reconnus pour leur aptitude à se faire beaucoup de nuyens, rapidement, en exploitant l’infrastructure informatique chancelante de Puyallup. Cet argent, ils le flambaient en cyberware extravagant : cybereyes aux motifs inquiétants, membres artificiels chromés de diverses couleurs, etc. Russel, qu’on avait déjà surnommé Roof, reçut comme « cadeau d’initiation » un implant de lames rétractables. Il demanda alors qu’on lui retire en même temps le datajack qu’il avait gardé du temps où il étudiait. Celui-ci n’allait plus lui être si utile puisque, comme il y avait déjà plusieurs deckers au sein du clan, ce qu’on attendait de lui, c’était de fournir leur protection.

Roof s’installa alors dans une ancienne salle de sport située sur le territoire du gang et s’y entraîna. En plus des connaissances sur la rue que les autres membres du gang lui apportaient, il pouvait pratiquer ses talents de combattant en salle comme sur le terrain. Il se spécialisa en garde du corps, en furtivité, puis, après avoir fait l’acquisition d’une Yamaha Rapier, en hit and run. Il noua une amitié pleine de respect avec un autre défendeur du clan, son partenaire d’entraînement, Ben Librojo. Mais il restait avec le gang pour une raison plus… ambitieuse.

Malgré tout ce qu’il fit pour rayer son ancienne vie de sa mémoire, une chose resta: sa fascination pour la relation entre l’homme et la machine, l’organique et le synthétique. Voulant faire de lui-même une expérience vivante, une application tangible des concepts qu’il avait étudiés, il entreprit, presque aveuglément guidé par sa passion, d’être cybermancié. Lors d’une discussion telle qu’ils en avaient entre deux séances d’entraînement, Ben fit comprendre à Roof qu’il vendrait à nouveau son âme à une corporation s’il en faisait ainsi, et qu’il ne serait pas en meilleure position qu’il l’était avant de quitter les écoles de Yamatetsu. Mais Roof tenait à son idée : il voulait devenir suffisamment cybernétique pour provoquer, pour déconcerter, pour vaincre tout ce qui pouvait se dresser contre lui dans les rues.

C’est dans ce désir de grandeur qu’il devint complice avec le Dr. Bob, encore plus que le reste du gang. Roof lui expliqua qu’il voulait être reconstruit de la tête aux pieds. Ce qui ne pouvait pas être remplacé par du métal allait à coup sûr être modifié d’une façon ou d’une autre. Ensemble, ils planifièrent chaque opération, cybernétique ou biotechnologique, ainsi que chaque traitement et chaque remplacement. Sur une période de deux ans, Roof devint ce qu’il voulait : une race à lui seul, un être unique, bestial mais hi-tech, sans aucune contrainte ou restriction. Libre.

La fraternisation des Reality Hackers avec les yakusas devenant de plus en plus louche aux yeux de Roof, il s’éloigna des activités du groupe pour un moment, cherchant des boulots solo ailleurs, des missions simples de traquage ou de garde du corps. C’est ainsi qu’il commença sa carrière de shadowrunner et qu’il délaissa progressivement les petits jeux des barrens pour aller pêcher du plus gros poisson, armé de son nouveau corps taillé sur mesure. Les soupçons de Roof finirent par se confirmer : les relations entre le gang et les yakusas s’envenimèrent au point de déclencher une campagne qui balaya presque entièrement les Reality Hackers. Presque totalement détaché du groupe à ce point, il ne souffrit pas trop de ce contretemps, se jurant de toujours se fier à son instinct à l’avenir.

Quelques mois plus tard, pourtant, il aida Ben Librojo à remettre les activités du gang en marche. Se considérant désormais comme n’étant « plus de leur calibre », Roof cessa d’être un membre actif du gang, mais ne leur devint pas hostile pour autant puisqu’il entretient encore sa relation avec Ben, qui est maintenant chef du gang. Il vit toujours dans le centre d’entraînement abandonné, dont il a renforcé la sécurité au fur et à mesure que son business dans les ombres devenait sérieux. Il a aujourd’hui une bonne toile de contacts et de connaissance des ombres, ainsi que des caractéristiques physiques pour le moins surhumaines. On a peine à croire qu’il a déjà été un fils corpo tellement il a l’air « street », de son look marginal jusqu’à sa façon de s’exprimer. Pourtant, bien qu’il ne soit plus le jeune garçon qu’il était, Roof conserve toujours son esprit critique, sa philosophie particulière, sa ferveur bestiale et son sens de l’humour mordant.